Letanovce

Après les derniers jours passés en catastrophe naturelle avec les inondations exceptionnelles qui ont ravagées tout le pays, mais par miracle ne nous ont  pas  directement touchées, nous pouvons faire le point de la situation actuelle en ce qui concerne le Festival Interbidonville "Akana me" du 12 juin prochain.


Finalement nous avons décidé de réaliser le festival au bidonville de LETANOVCE, qui se trouve à qques 20 km de Poprad et de Kezmarok, donc dans l´est du pays.

C´est un endroit qui est appelé à disparaître prochainement, car du fait de sa localisation á proximité du Parc National du Paradis Slovaque, ses habitants vont être bientôt délogés dans un autre village, construit à cet effet non loin de là. Ce "déménagement" a posé énormément de problèmes et a été suivi de prés par les médias au niveau international. Déjà pour trouver une localité apte à recevoir les habitants de Letanovce, des difficultés considérables ont du être bravées (pétitions, obstructions, agressions). En fin de compte un compromis a été trouvé en construisant les nouveaux logements sur un espace à cheval sur plusieurs communes, aucune ne pouvant de ce fait ni rejeter ni accepter les nouveaux venus en totalité. Plusieurs échéances ont étés fixées, mais à l´heure actuelle, personne ne sait quand exactement la "délocalisation" tsigane aura lieu.


En organisant un spectacle interbidonville sur ces lieux, nous ferons une sorte de fete d´adieux pour ce départ non volontaire mais inéluctable.
Le jour du festival, 12 juin, est aussi le jour des élections parlementaires en Slovaquie. Bien entendu, notre manifestation est absolument apolitique, mais en organisant le même jour, nous aussi des élections - du meilleur danseur et chanteur tsigane de nos bidonvilles respectifs, nous marquons notre préférence - artistique en occurrence, partant du principe avéré qu´une bonne chanson ou un solo de danse valent parfois mieux que bien des discours et slogans des affiches électorales, toutes tendances confondues...


Organisation:
hébergement à la pension de Dana à Nová Lesná ( 7 km de Poprad, au pied des Tatras)
ouverture du festival à 13 h sur un carré de terre battue à Letanovce (osada)
clôture du festival à 15 h

participants:

groupe de disco tzigane local

ensemble Kesaj Tchave

groupe les Ogres de Barback

habitants du bidonville de Letanovce, Velka Lomnica et Kubachy


Apres Letanovce


Nous venons de finir notre petit Festival Interbidonvilles à Letanovce. Tout s´est très bien passé. Pratiquement du professionnel. Tant notre prestation, que celle des Ogres de Barback, mais aussi du côté de nos amis "coorganisateurs" - les habitants de Letanovce, qui, avec Milan en tête, ont parfaitement assuré la logistique et l´organisation sur place, ainsi que la couverture de l´événement au niveau de la sécurité. Il n´y a eu d´ailleurs, aucun incident à déplorer dans ce sens. Tous les habitants, massés devant nous, se sont exemplairement bien tenus et malgré un soleil de plomb, ont littéralement "dévorés" le spectacle que nous leurs avons offert. Autour de l´enclos scénique érigé à cet effet avec du ruban en plastique, ils étaient tous là, massés à corps à corps, constituant une foule des heures de pointes du métro, débordants sur les toits des cabanes tout autour, qui par miracle réussissaient à tenir sous le poids des spectateurs de ces "tribunes" improvisées. Il y avait même un groupe de Français de passage, qui avaient découverts l´événement sur notre myspace, et qui ont fait le déplacement jusqu´à ce bout du monde. C´étaiet très sympa et très convivial. Les remerciements spontanés de Milan, l´autorité locale, étaient à ce titre éloquents: "Merci de tout coeur d´etre venus, comme ça, au moins, tout le monde voit que nous ne sommes pas des cannibales..." Oui, jamais rien de positif ne se produit ici, alors là, ça fait du bien à tout le monde. Comme c´était le jour des élections, il y avait une patrouille de police à l´entrée de la route défoncée qui menait au bidonville, mais, sympa, ils ont juste relevé mon identité sans nous importuner. Les élections m´ont inspirées pour ma tirade finale face au public, que j´escortais de voter dans vingt ou trente ans pour un des leurs, insistant sur le fait que même un de ces gamins qui  étaient massés là, devant nous, pourrait devenir un jour président comme ce brave Obama... Message reçu, et „En avant la musique!“ pour le final de la danse tout public confondu - il vaut mieux une bonne chanson, que des tonnes de discours et des mirages, même des plus prometteurs...


Tout est bien qui finit bien, à part le bilan financier qui nous réunit dans une égalité sans faille, au niveau bidonville, intervenants, comme interpellés, tous unis dans le même dénuement face à l´absence de toute implication institutionnelle. Mais nous n´avons pas à nous plaindre, puisque nous n´avons rien demandé à personne. A choisir entre s´investir dans l´élaboration fastidieuse des demandes de soutiens improbables à l´événement qui nous auraient prises tout notre temps, et la réalisation de l´événement lui-même, nous avons opté pour la seconde solution, fonctionnant sur nos fonds propres. Donc sur rien, juste sur un nuage fait d´amitié et des 300 eu apportés par nos amis Johann et Sébastien de Yepce,  qui ont réussi par je ne sais quel miracle à réunir cette somme en pédalant les deux mille km de ce fameux Défi Vélo, conçu pour le soutien de notre action. Sans oublier Gabi Jimenez qui a mis une de ses toiles en vente au profit du festival.

 

Donc, merci à Johann et à Seb, ainsi qu´aux Ogres, à Gabi et à tous les intervenants extérieurs qui nous ont portés par leur dynamique à nous engager une fois de plus dans cette aventure imprévisible, qui pourtant, finit toujours bien. Sans oublier l´intervention du XXI, qui par l´intermédiaire d´Alain Keler, relatant nos avenures sur les pages du prochain numéro par le crayon d´Emmanuel Guibert, nous a servi de relais avec Milan de Letanovce. Comme quoi, il en faut des détours pour aboutir finalement au bon endroit, au bon moment… entre les inondations diluviennes de la semaine derniére et la canicule tropicale d´aujourd´hui.

Nous sommes aussi passés jetter un coup d´oeil sur le nouveau village, non loin de là, déjà pratiquement prét à recevoir tous les habitants de Letanovce. C´était pas mal, impressionant, comme le sont toujours les nouveaux logements encore vaccants avant que les futurs habitants ne viennent les investir. Bien súr, il y a aussi cette vague impression de camp militaire (les autochtones l´appelent familiérement "Auchwitz"…), avec ses baraquements en ligne, tout dans un ordre géométrique parfait, dans une conception toute  à l´opposée de celle de leur habitat actuel fait de bric-à-brac dans tous les sens. Qui sait, peut-etre cet alignement cartésien participera-t-il au changement des mentalités tant espéré par les concepteurs de cette „mini migration des peuples“, ou au contraire, ce ne sera qu´un essai de plus, pour changer la facade, sans se poser de questions sur le contenu…

Quoi qu´il en soit, nous sommes heureux d´avoir pu intervenir encore tant qu´il était temps en ces lieux voués a disparaitre, et nous sommes prets à réitérer  de meme, sur cet nouvel espace, afin de l´ensorceler, le „marabouter“ a notre facon, afin que le passage sa fasse plus en douceur. Et que l´on n´oublie pas, que les nouveaux murs, meme en beton armé, indestructible, selon les voeux des braves concepteurs de ce vaillant projet humanitaire d´assainissement des alentours du Parc National du Paradis Slovaque, que ces murs des lendemains radieux doivent aussi accueillir la mémoire des baraques en rondins et tôle froissée, qui, outre la misére et le déséspoir, ont donnée naissance á toutes ces chansons magnifiques et splendides dans leurs simplicité, qui font notre bonheur à nous tous et que nous avons l´immense plaisir de pouvoir partager avec vous. Alors espérons, que dans ces amas de béton rectylignes, l´ame y aura aussi sa place et que la musique n´y sera jamais absente… Mais, heureusement, à ce niveau, je crois qu´il n´y a aucune crainte à avoir…

 

2015

Avec tendresse et émotion, en revoyant ces images et en relisant ces lignes, nous constatons, qu´en fait, a Letanovce, les Ogres ont fait la premiere partie de notre concert. Tout comme, en 2014, nous avons fait la premiere partie de leur concert de l´Olympia. Le monde est bien fait...