FIFI
Issoire, la première étape de notre tournée, est à quelques 1 700 km de Kežmarok. Nous optons pour le tracé par la Pologne, ce qui nous fait faire un petit détour, mais nous évite les contrôles surprises de la douane volante autrichienne ou allemande, qui, bien que nous sommes tous en règle, shengen, euro... sont tout sauf d´agréables rencontres entre pays amis. Après 24h de route nous sommes à Issoire, reçus les bras ouverts par les organisateurs que nous connaissons très bien, pour les avoir rencontrés il y a 6 ans, lorsque nous sommes passés à leur festival. A l´époque, ce fut une de ces rencontres que l´on n´oublie pas. Ils avaient une équipe de bénévoles de tonnerre, notamment des jeunes qui profitaient de la plonge à la vaisselle pour faire des batailles d´arrosage géantes, etc. Bref, nous étions chez nous. J´avais quelques appréhensions à revenir sur des lieux qui ont laissé à tous des souvenirs exceptionnels. Je craignais de décevoir nos hôtes. Nos petits, attachants et attendrissants à l´époque, étaient maintenant plus grands, plus distants... Mais il n´en fut rien, c´était comme avant, une parfaite entente et connivence. Dès le premier soir nous avons pu directement participer au défilé du 14 juillet. Magistral. Malgré une chaleur torride, tous nos jeunes étaient surexcités et impatients de montrer ce qu´ils savent faire, et au lieu de petites interventions de 10 à 15 minutes, ils ont joué et dansé à coeur-joie, d´affilé pendant les 2 heures du défilé, devant un public éberlué, n´en croyant pas ses yeux de voir cette liesse bigarrée, pleine de couleurs, de vie et de joie, dénotant absolument en tout par rapport aux autres groupes, chez les quels, obligatoirement, on sentait plus de convention, d´ordre, de contrainte... Là, il n´en était rien, c´était tout le contraire. Alors qu´aux autres il fallait toujours dire de commencer, de faire, pour nous le problème, c´était de s´arrêter, de ne rien faire...
Le séjour se passe très bien, il est très intense, les jeunes, en soif de représentation, ne s´économisent pas, la chaleur est tropicale, une vraie canicule, les forces s´épuisent rapidement. Mais il y a assez de ressources pour tenir toute la semaine et finir, comme il se doit, en apothéose au Gala de Clôture du Festival, suivi d´une méga discothèque qui met tout le monde en transe. L´hôtel qui nous logeait nous a décerné le prix de la bonne conduite, malgré le fait qu´au début ils étaient parfaitement odieux et désagréables en nous classant indésirables dès notre arrivée. Mais ils se sont ravisés par la suite, et nous sommes partis en clients parfaits que l´on voudrait revoir de nouveau! Nous laissons derrière nous des amis que nous avons retrouvés après des années, et que nous garderons des années dans nos coeurs.
2009
Issoire est la première étape des festivals CIOFF qui constituent le gros de notre tournée. Comme la plus part de ces lieux festivaliers, c’est un petit patelin, où l’investissement des bénévoles est palpable au mètre carré. On sent de partout cet engagement humain désintéressé, et cela dénote assez par rapport à l’inertie, si ce n’est de l’agressivité à la quelle nous sommes habitués chez nous. Nous y sommes rejoints par Alain et Anne Marie Cluzel de Felletin qui ont organisé toute notre tournée. C’est de vieilles connaissances, ils nous ont déjà invités pour 5 semaines il y a quatre ans, nous ont suivis depuis, sont venus nous voir chez nous, une vielle histoire, d’autan plus touchante qu’il s’agit de gens touts simples, dans le sens qu’ils sont profondément encrés dans leur région, ayant consacré une bonne partie de leur vie au folklore à travers leur festival en parallèle de leurs activités d’artisans et de commerçants. Pour nous c’est une véritable aubaine, et leur investissement auprès de nous nous a permis de perdurer en vivant des expériences magnifiques. Tout au long de la tournée ils seront présents à nos côtés avec leur petite fille Fleur qui nous émerveille en s’intégrant naturellement à nous, et ils nous épauleront de leur mieux.
Le soir même il y a un repas – rencontre entre les différents groupes. Cela se passe dehors, un groupe folklorique de la Creuse je crois, devant assurer une animation musicale pour tout le monde. Nous avons aussi avec nous nos guitares. Rien que notre arrivée avec des chants spontanés, tous en chœur, fait un sacré effet. Les Martiniquais et les Kenyans ne veulent pas être en reste, ils sortent leurs instruments de musique et n’en reviennent pas de voir tout à coups tous ces « blancs », que sont les tziganes pour eux, investir spontanément le parquet et la scène, et sans le moindre scrupule ni hésitation, s’éclater dans la danse comme en Afrique ou aux Antilles. Je ne me souviens plus pour quelle raison, mais je crois qu’il n’y en a eue aucune, Stano devient tout à coup parfaitement odieux, refusant ostensiblement de prendre part aux animations et à la bonne ambiance de tout le monde. Avec tout le passif qu’il se coltine, ces réactions me mettent hors de moi, pourquoi il s’obstine à venir, s’il ne veut rien faire ?! Si c’est comme ça dés le premier jour, il vaut mieux qu’il parte ! Et plus vite, sera le mieux ! Il faut savoir que ses états d’âme et de désobéissance démonstrative sont accompagnés de toute une mise en scène savante et perfide qui n’a d’autre but que de nous narguer, Helene et moi , et en touts cas, en ce qui me concerne, c’est réussi, je n’ai plus qu’une envie, c’est de le virer, et je suis en pétard contre Helene qui essaie de tempérer. J’ai beau me casser la tête depuis des lustres, je n’arrive pas vraiment à comprendre le pourquoi de ces comportements autodestructeurs, et vu le degré de mon épuisement je n’arrive pas à avoir de la distance, à assumer. S’il partait, ça serait le mieux.
C’est le 14 juillet. Tous les groupes assurent un défilé nocturne à travers la ville. On a la patate. Stano sent qu’il a exagéré la veille met le paquet, entraînant Ivana, et de façon totalement improvisée nous arrivons à mettre une sacrée ambiance et d’amblée, attirer toute l’attention sur nous. Il s’avère que le groupe des Cosaques qui nous précédent dans le défilé, c’est celui de Stavropol, une troupe excellentissime, que nous avons déjà rencontrés il y a deux ans. Retrouvailles, émotions. Après un feu d’artifice magnifique, vu toute la foule qu’il y avait au stade, je préfère rentrer et ne pas participer à la discothèque afin d’éviter les ennuis éventuels. C’était sans compter que l’on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Le temps que je me tourne pour appeler les chauffeurs du bus sur le portable une bagarre éclate. Qui c’est ? Mais Stano et Figo qui se distribuent des mandales devant toute la foule. Je saute dans le tas. Décidément je deviens physique et nerveux avec l’âge. Je suis tellement en pétard que je suis presque déçu qu’ils s’arrêtent, et m’empêchent par là de leur taper dessus. Une baffe quand même à Figo, plus une série de pompes. Stano, c’est pas la peine, ce n’est pas son truc. Par contre, avec Hélène, on lui déballe nos quatre vérités. On se serait bien passés de tout cela. Surtout que Stano, sous le choc, sort des trucs pas trop sympas à Hélène, et elle, elle n’est pas du genre à oublier ni à pardonner. Moi, finalement, bien que je gueule pour la forme, au fond de moi je trouve ça plutôt marrant, deux danseurs qui se foutent sur la tronche pour savoir le quel est le meilleur. Au moins ça prouve qu’ils s’intéressent au groupe et qu’ils ne sont pas des mauviettes… Mais chez Hélène, il n’en est pas de même. Jusqu’à la fin de la tournée elle n’a pratiquement pas adressée la parole à Stano, et moi, lorsque je voulais communiquer avec lui (tant qu’il était là, il devait assumer sa fonction d’instructeur), je m’exposais au courroux d’Hélène, ce qui n’est pas peu de choses, comme tout le monde le sait. Mais bon, on enchaîne, on n’en est qu’au début de la tournée, cela ne fait que commencer. Nous donnons plus de responsabilités à Cyril, et Janka aussi, est plus en avant, Ivana ayant aussi parfois une approche mitigée de ses responsabilités. Sans toutes fois, jamais atteindre ce stade de provocation odieuse comme Stano en a le secret.
Dés les premiers jours les organisateurs font preuve à notre égard d’une attention toute particulière. Nous sentons une vraie émotion dans l’intérêt qu’ils portent au groupe et aux gamins. Matej, mais aussi les autres devenant instantanément les coqueluches du public et de tous les festivaliers, bien entendu. Et cela, ce fut une constante lors de toutes les étapes – festivals de notre tournée. Avec des pics – comme avec les Chiliens avec leurs Bandaconmotion, une fanfare délurée, complètement délirante, à la Kusturica, que nous croyons d’abord tzigane, mais qui, heureusement (dixit les nôtres), s’avère sud-américaine. Mais aussi les Russes, Martiniquais, Haïtiens, Kenyans… et même les Hongrois, arrivent à communiquer avec nous. Sans parler de l’équipe des jeunots de la plonge de la cantine du festival, totalement sympathiquement barges, qui se sont pris d’une telle amitié pour notre groupe, qu’ils ont même offert une super guitare à Matej, et nous ont suivis lors des différentes étapes de la tournée.
Par contre, cette première semaine nous a complètement épuisés. Tous ont attaqués à fond, sans retenue, et nous nous retrouvons lessivés, à plat, avec plein de petits bobos, des viroses, Matej est KO, comment tenir à ce rythme jusqu’à la fin ? Moi-même, j’étais déjà usé avant de venir, alors maintenant, j’ai du mal à suivre. A tel point, que même la rencontre avec les Voyageurs du coin que nous avons élaborée avec Jean Claude, notre accompagnateur local, a du être annulée. Heureusement que l’étape suivante doit être à Autrans, où nous n’aurons pas le même rythme soutenu et il n’y aura pas autant de sollicitations de tous les côtés.
J’oubliais qu’Issoire a marqué aussi le sacre de Janka comme vice reine du festival, suite à un concours de danse, qu’elle aurait dû, suivant l’avis général et même celui des gagnants, les Martiniquais, gagner. Ce concours était très sympa, précédé de toute une préparation démesurée de 4 heures par jour sous les directives de Jean Luc, maître de ballet de son état, qui s’est investi sans compter dans cet événement. Au début je craignais une surcharge de fatigue, je ne me trompais pas, mais c’était très bien, les chorégraphies de pointe de notre cher Jean Luc ont bien occupées tout le monde, et l’apothéose a eue lieu lors du concours en public, devant un jury impartial ( ?) dans une atmosphère bon enfant, populo, le dernier jour du festival, en plein centre ville. Ce fut aussi l’occasion de sa vie pour Roman Jackson d’utiliser enfin son fameux CD de Jackson, qu’il a toujours sur lui, et depuis 6 ans qu’il est dans le groupe, avant chaque spectacle il me demande s’il on peut le passer pour qu’il danse dessus. Depuis 6 ans, à chaque fois je lui dis que non, en général les endroits et les manifestations que nous fréquentons ne se prêtent pas à ce genre musical. Patient, il obtempère à chaque fois, range son CD pour le ressortir le lendemain pour me demander la même chose le jour suivant. Comme ça, depuis des années. Il faut dire que pour Roman, Michael Jackson est bien plus qu’une idole, c’est une idolâtrie, une religion, une vocation, une passion, et je ne sais quoi encore, si, une incarnation ! Depuis qu’il est tout petit il s’entraîne tous les jours devant la glace, et il a failli ne pas venir en tournée à cause du décès récent de Michael. Lui-même, Roman, il signe partout Roman Jackson et est constamment à la recherche de la perfection tant artistique, que vestimentaire pour s’approcher au mieux de son rêve. En ce moment il cherche un chapeau noir… Bon, Roman a eu quelques graves soucis de santé étant petit, il s’est construit son monde à lui, devenu grand il est au RMI, éboueur au service de la ville, et hormis sa passion jacksonienne, il adore aussi tout ce qui est tzigane. Il a un charisme véritable, et j’aime le voir à mes côtés lors des spectacles, son engagement total m’aide dans ma démesure. Donc voilà, enfin son heure est arrivé. Dans le cadre de ce fameux concours de danse, vu l’actualité de la disparition tragique de Michael, les organisateurs sont tout à fait d’accord pour qu’il intervienne et lui laissent la scène, avec son CD. Pour Roman il y aura eu avant Issoire, et après Issoire! Sa prestation devant la foule qui l’acclame le transcendante, il y met tout, il n’est plus Roman Jackson, il est Michael Jackson! Alors à Autrans, encore sous l’effet tout frais de cette expérience quasi mystique, hors commun pour lui, tous les soirs, lors des discothèques improvisées il met en transe tout le groupe qui le suit comme un seul homme, et lui, luisant de sueur il est l’incarnation même de ce Michael Jackson, à l’évidence redescendu sur terre, devenant pour quelques instants Roman pour le plaisir des petits et des grands.
Issoire – defilé du 14 juillet, 14.7.2015
Issoire – déambulation, Ouverture du Festival, Pomel, 15.07.2015
Issoire – Centre aéré 10h30, Parc Bout du monde, 16h30, 16.7.2015
Meilhaud – spectacle, 16.7.2015
Issoire – Parc Bout du Monde, espace en ville, 17.7.2015
Ambert – spectacle, 18.7.2015
Issoire – defilé, Final, 19.7.2015