Montoire
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37e Festival de Montoire
Montoire – Ouverture du Festival, 11.8.2009
Montoire – Gala d’ouverture, Palais de Toile, 11.8.2009
Montoire – Animation à l’hôpital, 13.8.2009
Montoire – FR3, direct infos du soir, 13.8.2009
Montoire – Animation à la Fête foraine, manéges 13.8.2009
Montoire – Gala panorama, Palais de Toile, 14.8.2009
Montoire – défilé, 15.8.2009
Montoire – spectacles après midi et en soirée, 16.8.2009
Même avec le GPS, j’ai l’impression que nous nous trompons de route en approchant Montoire, tellement les chemins que nous empruntons sont petits et semblent mener nulle part. Mais il n’en est rien. Montoire est bien au bout de ces détours sur le Loir, et nous devant une autre étape, pas des moindres, de la tournée. En effet, si j’ai bien cru comprendre, il y avait des hésitations de la part des organisateurs de ce festival pour nous prendre, et Alain Cluzel au du, une fois de plus, batailler et s’engager personnellement pour nous ouvrir des portes. Ces hésitations, je les comprends, elles sont légitimes. Prendre une troupe de gosses est osé dans un environnement d’adultes que sont ces festivals et peut engendrer des complications supplémentaires. Je ne pense pas que le fait qu’il s’agisse des tziganes entre en compte, mais qu’il soit question des jeunes venant des milieux socialement déstructurés ne peux pas passer inaperçu, et peut engendrer des craintes et des réticences justifiées dans un milieu qui n’a pas à priori une vocation d´oeuvre sociale. Heureusement, dés les premières prestations il n’y a plus le moindre doute sur la nature et la qualité de notre troupe, au contraire, tout le monde, et le président du Festival, Jean François Prous en tête, nous est acquis. Bien sûr, plus les festivals sont importants, plus ils drainent du monde, plus les conditions sont dures, nécessitant de notre part une gestion de notre groupe des plus élaborées, surtout au niveau des temps de récupération qu’il faut savoir prendre dés qu’une occasion se présente. Je pense qu’à ce point de la tournée – la cinquième semaine sur les routes, nous sommes déjà sur un rythme de croisière, et nous arrivons à éviter les excès comme ce fut le cas au début de notre périple. Ici il n’y a pas de piscine, mais nous avons vécus une soirée mémorable à la Fête Foraine, où, après avoir joué et dansé pour les forains, nous avons été récompensés par des tours de manèges à volonté. Sans commentaires. Que du bonheur. Montoire a marqué une étape dans notre tournée. Un certain seuil de fatigue étant dépassé, surtout de ma part, sentant aussi que la fin de la tournée approche, mais aussi retrouvant enfin mes forces (déjà dés le départ j’étais complètement épuisé par le stress accompagnant les préparatifs), je pouvais de nouveau lancer des prestations à fond, sans ménagement. Il faut savoir aussi que nous n’avions que des interventions de 15 à 20 minutes à assumer, mais la plupart de temps dans des plages horaires qui nous fesaient rentrer toujours après minuit. Mais comme il n’y avait pas de spectacles dans la mâtiné, le groupe pouvait récupérer à sa guise jusqu’à midi. Cette certaine aisance se sentait et se voyait même sur pratiquement tous les participants, notamment les petits, qui s’épanouissaient tout en prenant du poids, ils engraissaient littéralement à vue d’œil. Et ça, ça me remplissait d’une satisfaction indescriptible. C’est basique, mais quand on sait d’où viennent ces mômes, qu’ils sont plus souvent affamés que rassasiés, que des journées où ils n’ont même pas un morceau de pain à se mettre sous la dent ne sont pas rares, les voir s’empiffrer tout au long des jours et des nuits me remplissait d’une sorte d’allégresse jouissive qui suffisait toute seule à palier les difficultés rencontrées.
Montoire-sur-le-Loir sera pour nous aussi synonyme d’un « fait d’armes » mémorable. Le défilé. Tous les défilés, de par leur principe de déambulation dans les rues, dans notre cas sans batteries, percussions ni fanfares, donc en position de faiblesse par rapport aux batagoudas et autres tam-tams hyper performants au niveau sonore, sont des épreuves, petites ou grandes, en fonction du parcours, de sa longueur, des conditions météo, etc. Ici, toutes les conditions pour un défilé archi éprouvant ont étés réunies. Il fallait faire deux fois le tour de la ville, en plein après-midi, avec 36 à l’ombre, dans un parcours sans ombre, bref, deux heures en plein soleil au plus fort de la canicule d’été. Même les Haïtiens ont déclaré forfait, en refusant tout simplement de danser sous ce soleil de plomb. Les autres groupes aussi ont étés ménagés, ils n’avaient que des prestations ponctuelles à certains endroits à assurer, sans déambuler comme nous. Finalement, nous nous sommes retrouvés pratiquement seuls à faire le défilé avec quelques formations bretonnes, fortes de leur puissance sonore grâce aux bignous et autres instruments aux timbres perçants, fortement représentés au sein de leurs orchestres. Au début je voulais faire à l’économie, en profitant de la moindre parcelle d’ombre pour s’y réfugier. Mais tout le monde était complètement amorphe, sans entrain, ce qui était tout à fait légitime, vu le soleil de plomb qui nous tombait carrément dessus et nous assommait avant que l’on ait pu tenter une quelconque manœuvre salvatrice. Il n’y avait personne pour entrainer les autres, tous ne fesaient que traîner lamentablement comme si nous étions en plein milieu du Sahara, et effectivement, ce jour nous étions au Sahara-sur-le-Loir… Alors, réagissant impulsivement j’ai lancé l’ordre aux garçons d’arroser les filles avec les bouteilles que nous avions pour nous désaltérer, ce qui fut fait dans l’instant même, les filles rendant le même service aux garçons, et c’est dans un arrosage mutuel, tous entièrement trempés, que nous avons entamé notre défilé. L’ambiance devenant du coup euphorique, foldingue, nous avons interprété tout notre répertoire au pas de course en enchainant les danses telles qu’elles se suivent dans notre programme classique, toujours sans s’arrêter de s’arroser de plus belle. Nous avons laissés les petits se reposer pendant le premier tour de la ville sur des chars allégoriques, pour mieux les lancer dans l’action au deuxième tour, lorsque les grands commençaient à tituber. C’était quelque chose de totalement insensé. Le public, enthousiaste, nous observait, écarquillant les yeux devant cette folie collective qui nous transcendentait dans une transe loufoque, digne des grands comiques du cinéma muet où tout le monde part dans un délire collectif à la chantilly que plus rien ne peut arrêter. Au bout de deux tours et demie de la ville, nous nous sommes arrêtés, trempés, épuisés, mais heureux d’avoir accomplis un exploit tous ensemble. Je crois que c’est exactement de ce genre d’expérience, de dépassement de soi collectif que nous avions besoin. Il nous manquait tout simplement, pour cause d’économie d’énergie, des dépenses, des dépassements collectifs de soi, comme nous en avons l’habitude tous les jours lors de nos méga répétitions – marathons, et qui sont ce qu’il y a de mieux pour souder un groupe. Il nous en a coûté de deux guitares qui n’ont pas tenues le choc, elles sont tombées au combat, sous les mains des danseurs, servant de tambours, les cordes à elles seules ne suffisant pas à entrainer tout le monde. Heureusement dans ce cas, nos instruments ne sont pas des pièces de collections, et à l’étape suivante nous avons pu en racheter une aux puces pour pas grand-chose. Donc, dorénavant tous les spectacles allaient tambour battant, et ce, quelques soient les conditions dans les quelles nous nous produisions. A midi, ou à minuit, toujours le même engagement, sans retenue, toujours à fond. Finalement, les gosses ont énormément d’énergie, ils récupèrent très vite, c’était plutôt moi, qui avait besoin de reprendre mes forces pour pouvoir servir de moteur dynamiseur pour tous.